CRISE, INDUSTRIE ET PRESSE

CRISE, INDUSTRIE ET PRESSE

La communication de crise dans le secteur agroalimentaire, l’image de l’industrie et l’avenir de la presse papier sont au cœur de cette revue de web en ce début d’été.

Communication de crise et agroalimentaire

Des scandales alimentaires ont entrainé une forte couverture médiatique et nécessite une communication de crise adaptée. Olivier Cimelière, journali-communicant du Blog du Communicant 2.0 analyse la communication de crise de Kinder et Buitoni. Entre le 18 mars et 4 avril dernier, deux groupes de l’industrie alimentaire, Nestlé et Ferrero, ont dû faire face à cause de graves intoxications alimentaires liées à la consommation de leurs produits (dont certaines mortelles). Fraîch’Up, la marque de pizzas surgelés de Buitoni a été alors retirée du marché à cause d’une possible infection à la bactérie Escherichia-Coli. Puis les confiseries chocolatées Kinder ont été enlevées des rayons à la suite de dizaines de cas de salmonellose. Très rapidement, les usines ont aussi dû être fermées sur les décisions des autorités publiques. Cette crise a entamé durablement la réputation des deux marques. De plus, leur stratégie de communication de crise n’a pas toujours été exemplaire.

La couverture médiatique fut importante avec les réactions épidermiques récurrentes sur les réseaux sociaux. De plus, la manière de gérer la crise et de prendre en compte la sécurité des consommateurs les marques Buitoni et Kinder ont été vivement critiqués.

Le 18 mars 2022, la marque a diffusé un communiqué annonçant le rappel de l’ensemble de la gamme Fraîch’Up et demande aux consommateurs ayant acheté des pizzas surgelées de cette gamme avant cette date à ne pas les consommer et à les jeter. Mais quelques jours auparavant, la direction générale de la santé (DGS), Santé publique France et la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) ont aussi annoncé que la recrudescence des cas de contaminations graves à la bactérie E. coli avait causé la mort de deux enfants en France depuis le début de l’année. Les investigations réalisées sur différents cas graves signalés depuis début janvier en France, montrent que « les analyses (épidémiologiques, microbiologiques et de traçabilité) menées suggèrent, à ce stade, un lien possible avec la consommation de pizzas surgelées de la gamme Fraîch’Up de la marque Buitoni ».

Deux semaines plus tard, un autre site industriel connait une crise. L’usine d’Arlon localisée en Belgique fabrique de nombreuses confiseries chocolatées sous la marque Kinder pour plusieurs marchés européens. Or, plusieurs cas d’infections aux salmonelloses viennent d’être détectés à la suite d’enquêtes effectuées par les autorités sanitaires belges et françaises (donc une vingtaine en France). Le 4 avril dernier, un communiqué de Ferrero demande aux consommateurs à ne pas consommer les références incriminées et à prendre attache avec la ligne d’assistance dédiée. Un rappel volontaire de plusieurs des produits l’entreprise est alors effectué.

De ces crises, Olivier Cimelière en tire des leçons. Son premier enseignement : jouer cartes sur table. Si Ferrero publie un deuxième communiqué qui précise que d’autres bonbons Kinder produits à Arlon rejoignent la liste des produits retirés du marché, la marque admet qu’elle avait identifié la présence de salmonelles sur son site industriel le 15 décembre 2021 et que des mesures correctrices avaient été mises en place. Elle se félicite aussi de sa collaboration avec les autorités de sécurité alimentaire et de santé publique. Dès le lendemain, l’agence de sécurité alimentaire belge (AFSCA) décide l’arrêt de la production de l’usine à l’origine de contaminations à la salmonellose. Du côté de Nestlé, la maison-mère de Buitoni, se retranche derrière la procédure judiciaire en cours afin d’éviter de communiquer. Néanmoins, à travers une vidéo en ligne, Jérôme Jaton, directeur général industriel de Nestlé France répond depuis le site de Caudry à différentes questions relatives à la crise en cours.

Le deuxième enseignement consiste à toujours traiter les signaux faibles avant qu’ils n’empirent. Le lendemain des déclarations du directeur industriel de Nestlé France, un lanceur d’alerte anonyme met en ligne des clichés des lignes de fabrication de pizzas à Caudry. Les photos dévoilées montrent des vers dans la farine utilisée pour faire les pizzas et des déchets alimentaires dispersés sur le sol jonché. Le directeur général de la communication de Nestlé France, Pierre-Alexandre Teulié, confirme à l’AFP que les visuels ont bien été pris dans l’usine mais qu’elles ne correspondent plus à la réalité actuelle. Pourtant, un premier signal faible s’était produit le 11 mai 2021 sur le site Web altermondialiste Mr Mondialisation sur lequel un reportage porte sur l’état des conditions sanitaires et hygiéniques de l’usine de Caudry. Puis le 31 mars 2022 à une heure de grande écoute sur la radio RMC Info, un ancien employé de l’usine à l’origine des photos, témoigne sur les mauvaises conditions d’hygiène de l’usine et raconte avoir prévenu la direction à l’époque. Quelque temps plus tard, un reportage est publié sur le sujet dans le magazine Marianne et la presse locale.  Enfin, une ancienne directrice de la communication de Nestlé France témoigne à charge dans Le Journal du Dimanche.

Le troisième enseignement : il faut déminer les potentielles crises adjacentes. Les deux entreprises ont aussi commis quelques erreurs et favoriser un déchaînement plus important sur les réseaux sociaux. Le 22 avril, les parents d’une fillette contaminée par la bactérie E.coli après avoir consommé une pizza Buitoni ont reçu un bon d’achat de 20 euros de la marque. Côté Ferrero, un bon d’achat de 3 euros avait été remis aux parents d’un enfant malade. En revanche, le numéro dédié à la crise a été saturé pendant plusieurs jours rendant impossible les demandes de dédommagement. Olivier Cimelière conseille de calibrer les dispositifs, soit en renforçant les capacités du service consommateurs, soit en arrêtant toutes les autres opérations marketing en cours ou programmées afin d’éviter des conflits d’image.

Dans les deux cas présents, Nestlé et Ferrero ont été accusées d’avoir réagi trop tard. Bien que jugée trop tardive par des associations de consommateurs, le directeur général de Ferrero France a répondu aux questions et accusations des lecteurs d’Aujourd’hui/Le Parisien le 27 mai dernier. Dans cet entretien empathique, il reconnaît les défaillances de l’entreprise et prend des engagements pour les résorber. En revanche, Nestlé a adopté une communication très silencieuse qui a été critiquée.

De l’industrie valorisée à la presse papier

Si l’industrie souffre encore trop souvent d’une image « à la Zola », certains de ces acteurs travaillent à valoriser ce secteur d’activité.  Une table ronde animée par le journaliste spécialiste de l’innovation Jacques Pary a traité de la représentation de l’industrie  : Fabrice Le Saché, vice-président et porte-parole du Mouvement des entreprises de France (Medef) ; Erwan Coatanea, Président de Sodistra ; Isabelle Patrier, directrice France de TotalEnergies ; Bruno Berthet, Président du Groupe des Industries Métallurgiques (GIM). La vidéo de ces échanges qui ont eu lieu au salon Global Industrie, ont été diffusés sur le réseau social Youtube :

Enfin, avec la disparition prochaine de la presse papier annoncée, la BnF et les Assises du journalisme ont organisé une après-midi d’étude avec les acteurs des médias qui croient encore à son avenir. Par ailleurs, des conservateurs ont témoigné sur leur mission de collecter, de préserver et de rendre accessible ce patrimoine. Une vidéo de cette rencontre est proposée sur YouTube :