COMMUNICATION, DESINFORMATION ET COMMUNITY MANAGEMENT

COMMUNICATION, DESINFORMATION ET COMMUNITY MANAGEMENT

La communication environnementale, la lutte contre la désinformation et le community management en France en 2021 : voici les thèmes de la revue de web de janvier 2022.

De l’environnement aux sciences

Faire le buzz ou l’incitation à agir : voici les enjeux de la communication environnementale sur Twitter. Pour le site Internet de The Conversation, Emmanuelle Reynaud, Enseignant-chercheur en sciences de Gestion à l’IAE Aix-Marseille Graduate School of Management de l’Aix-Marseille Université et Sébastien Mariaux, Docteur en sciences de gestion, Aix-Marseille Université (AMU) ont traité de la communication sur la transition écologique sur Twitter. Ils ont identifié les mots les plus fréquemments utilisés et leurs liens.

L’économie sociale et solidaire (ESS) est associée au développement durable, à l’économie circulaire et à la responsabilité sociale des entreprises. Le mot-clé « environnement » est très lié aux problématiques liées à la santé et à la pollution, ainsi qu’à l’agriculture et à l’usage de pesticide. Il est aussi associé à des questions sociales, humanitaires. Les sujets relatifs aux déchets sont également rattachés au recyclage et aux différentes alternatives (réemploi, bio-déchets, gaspillage…). Concernant le « climat », « COP21 » occupe une place importante.

La problématique de l’énergie est rattachée à l’innovation, à l’urbanisme et aux alternatives renouvelables. La coopérative Enercoop est fréquemment employée comme mot-clé. Le débat sur l’énergie nucléaire se différencie de celui sur l’énergie en général. Les citations d’exemples emblématiques d’accidents industriels (Tchernobyl, Fukushima) montrent une mise en avant des dangers plutôt que des avantages de cette source d’énergie. Climat, énergie, recyclage, déchets sont donc les sujets les plus abordés dans les tweets environnementaux.

Les tweets dont le contenu est le plus repartagé, sont majoritairement subjectifs et présentent une connotation négative. Par ailleurs, les dirigeants sont traités de « Pinocchio » (Les amis de la terre, 250 partages) ou accusés de réaliser un « acte stupide et criminel » (Fondation Nicolas Hulot, 501 partages). L’ironie est parfois utilisée comme dans un tweet de Greenpeace qui diffuse ce message : « Pas un mot d’Emmanuel Macron sur l’écologie. Étonnant ? Pas tant » (262 partages).

Le point commun des tweets les plus diffusés est la volonté d’alerter. Ils s’expriment fréquemment sur des positions politiques critiques en lien avec l’actualité. A l’exception d’un tweet encourageant les lecteurs à aller voter (225 partages), aucun n’incite à agir.

D’ailleurs, lorsque l’on pondère la performance par le nombre d’abonnés, le classement des tweets les plus « influents » et leur nature sont totalement différents. Dans ce nouveau classement, se distinguent des tweets beaucoup moins polémiques, plus positifs et objectifs. Les sources sont souvent citées : ainsi, le tweet le plus influent mentionne l’ancien ministre des Affaire étrangères Hubert Védrine.

D’autres messages visent à informer et à agir. Certains tweets sont axés sur le recrutement ou la recherche de financements ou l’obtention d’un prix. D’autres incitent les lecteurs à modifier leur comportement, comme par exemple, un tweet suggérant de réemployer son matériel informatique ou les appels au bio et au local. Ainsi, ils peuvent entraîner une transition écologique avec une somme d’actions individuelles.

Si les tweets positifs et objectifs semblent les plus performants et favorisent des changements de comportements concrets d’une population déjà consciente de la nécessité de la transition écologique., le nombre d’abonnés est déterminant pour transmettre un message au-delà de sa propre audience.

Selon les universitaires, les organisations de l’ESS bénéficiant d’une audience importante, comme les Restos du Cœur, la Croix-Rouge ou Oxfam France pourraient continuer à communiquer avec des tweets critiques pour « faire le buzz » mais compléter leur tweet par un appel à l’action.

L’incitation à l’action est aussi présente dans le film « Don’t Look Up » du réalisateur Adam McKay. Pour le site internet The Conversation, Valérie Masson-Delmotte, Chercheuse en sciences du climat, coprésidente du groupe de travail I du GIEC, directrice de recherche au CEA (Commissariat à l’énergie atomique) et à l’Université Paris-Saclay analyse les ressorts du film « Don’t Look Up : Déni cosmique » avec Jennifer Lawrence et Leonardo DiCaprio, diffusé le 24 décembre 2021 sur Netflix afin de faciliter la vulgarisation scientifique. Selon la chercheuse, le réalisateur fait appel à « l’absurde, le comique, à une douleur très réelle », afin de faire réfléchir sur notre capacité à agir face à une menace grave, et souligner la nécessité de « la prise de conscience, la volonté et l’action ».

Le film montre aussi le décalage, que la chercheuse a souvent ressenti, entre la recherche scientifique, les médias et le pouvoir politique. Il soulève ainsi la question de la formation des scientifiques pour s’exprimer dans les médias, et la difficulté de journalistes ou des décideurs politiques à intégrer les connaissances scientifiques. En outre, lorsque les femmes scientifiques expriment leurs émotions, elles peuvent rapidement être considérées comme hystériques.

Le film révèle également le décalage entre le mode de fonctionnement des scientifiques et les moments d’échanges, rares et brefs, avec les décideurs politiques – qui s’appuient parfois davantage sur une opinion individuelle que sur des connaissances. Ainsi, Valérie Masson-Delmotte a dû présenter un rapport du GIEC à un chef d’État en trois minutes. Elle a noté également que la majorité des décideurs ne lisent pas les « résumés à l’intention des décideurs » du GIEC.

De plus, le film met en évidence le cynisme et le déni de responsabilité, l’absence de capacité d’analyse d’une situation inédite et des risques associés aux options d’action et à leur échec possible, l’incapacité à se projeter, et l’absence de leadership, illustrant la façon dont les scientifiques peuvent être utilisés dans un storytelling politique.

Par ailleurs, Valérie Masson-Delmotte a remarqué plusieurs fois des comportements associant cynisme, cupidité et absence d’empathie, lors de discussions informelles précédant ou suivant des tables rondes au contenu très policé en lien avec la finance, la technologie, l’innovation, les grandes entreprises.

Selon la scientifique, le film illustre les travers de la société du spectacle et de la surconsommation, le mode de fonctionnement de certains médias, la désinformation qui se diffuse plus vite que les connaissances solidement établies.

Le film ne montre que partiellement le cynisme de ceux qui profitent du statu quo, ou le rôle des marchands de doute qui ont construit la désinformation et le greenwashing afin de provoquer la confusion et de sauvegarder leurs profits.

Selon la chercheuse, la satire et le rire sont des leviers efficaces afin de susciter la réflexion et stimuler l’esprit critique et la curiosité. Enfin, la scientifique remarque note en tout cas que ses avis sur le film, postés sur Twitter, ont entraîné plus de réactions en un seul jour que son résumé du rapport du GIEC de l’été dernier en près de cinq mois.

Désinformation et réseaux sociaux

La lutte contre la désinformation est un des chantiers du quinquennat de la présidence d’Emmanuel Macron. Dans l’émission L’invité(e) Des Matins sur France Culture, le journaliste Guillaume Erner avait invité l’historien, Jean Garrigues et le chercheur en sciences de l’information et de la communication à l’université Paris II Panthéon-Assas, Romain Badouard pour traiter du rapport de lutte contre la désinformation de la commission « Lumières à l’ère numérique » au président. Il porte sur la lutte et la prévention contre les fausses informations dans la période propice à leur diffusion que représente la campagne présidentielle. Une « infodémie » a accompagné la propagation du coronavirus dans le monde. Elle concerne les fausses informations sur le covid-19, comme les discours antivaccins.

Selon Jean Garrigues, un membre de la commission, leur démarche est une recherche dans la confrontation des points de vue en essayant d’aller vers un discours de compétences, d’expertise et en tentant de confronter les idées avec la réalité des faits. L’historien déclare aussi : « Sur les réseaux sociaux, les discours antivaccins sont privilégiés, créant un déséquilibre réel par rapport à la recherche de la vérité scientifique. Lorsque ces discours sont en décalage absolu avec les faits et la réalité, alors il faut les contourner. Non pas les interdire mais les expliquer, donner les moyens à ceux qui les reçoivent de savoir qu’il y a une vérité scientifique. »

Romain Badouard remarque, quant à lui, : « Le mouvement antivax ne peut pas être résumé à une seule exposition à de la désinformation, même si elle existe. Ce qui change avec les réseaux sociaux, c’est la question de la confrontation à des arguments contradictoires. La manière dont l’information est diffusée repose sur la préférence de leurs usages. En fonction de notre historique de recherche par exemple, ils vont nous proposer des contenus qui ressemblent à ce qu’on connaît déjà. Plus je consomme des contenus qui vont dans un seul sens, plus on m’en proposera. Dans le cadre de la crise sanitaire on a vu des plateformes mettre en place des mécanismes d’information spécifiquement sur ces questions sanitaires. »

Pour faire de l’audience, il faut suivre certaines règles sur les réseaux sociaux. Pour le site Internet du Siècle Digital, Valentin Cimino présente les résultats de l’étude publiée le 25 janvier dernier, Agorapulse, première plateforme française de social media management. Afin de comprendre les pratiques des community managers, les équipes de la société ont analysé 1,6 million de publications entre juin et novembre 2021.

Facebook continue à être le réseau social le plus utilisé par les community managers. Puis Instagram se place en deuxième position mais son volume de publications représente 18,5% sur l’ensemble des réseaux sociaux. Ensuite, suivent Twitter, LinkedIn et YouTube.

Mais Twitter remporte la palme par la fréquence de publications. Ainsi, les community managers publient en moyenne 18 tweets par mois sur ce réseau social. Facebook occupe la deuxième position avec une moyenne de 10 posts/mois, suivi par Instagram (8 posts/mois), puis LinkedIn (7 posts/mois) et YouTube (4 posts/mois).

Dans son étude, Agorapulse a également analysé les contenus qui ont remporté le plus d’engagements au cours de l’année 2021. Si la photo est la plus partagée (environ 75%), le carrousel est aussi un format qui connait du succès. La vidéo est le contenu le plus engageant sur Facebook. De plus, le partage de lien entraîne davantage d’engagement sur Facebook que sur LinkedIn.

Le samedi et le dimanche semblent être les deux journées les plus efficaces pour les community managers. Sur Facebook, l’engagement est plus important à 13h et après 19h alors que sur Instagram et Twitter, il est conseillé de publier l’après-midi et le soir après 21h. En revanche, sur LinkedIn, il est préférable de publier tôt le matin ou après 18h.

Enfin, les hashtags est le dernier point examiné. Sur Instagram, 80% des publications avaient au moins un hashtag. Selon Agorapulse, sur Instagram, LinkedIn et Twitter, l’utilisation de hashtags facilite plutôt l’engagement pour les petits comptes.