REVUE DE WEB JUIN

REVUE DE WEB JUIN

La 5 G, la désinformation sur la santé, la médiatisation des enjeux spatiaux et le lien entre le bien-être au travail et la performance : voici les mots-clés de cette revue de web estivale.

La 5 G et la désinformation

Des nouvelles technologies de télécommunications mobiles entrainent des mutations médiatiques. Paul Simon, directeur de JPS Public Policy Consulting explique les usages de la 5 G dans les médias pour le site Internet « La revue des médias ».

La cinquième génération de réseaux de télécommunications mobiles devrait arriver progressivement dans les prochaines années. Vers 2025, la 5G ne représenterait que 14% des technologies mobiles, selon la GSM Association (GSMA, une association qui représente plus de 750 opérateurs dans le monde).

Grâce à cette nouvelle génération, les vitesses de transmission de données seront 100 fois plus élevées que celles de la 4G avec un délai de transmission de la communication 10 fois plus faible, et des capacités de réseaux multipliées par 100.

L’organisme propose trois pistes principales d’améliorations fournies par la 5G sur le plan technique : des services haut débit mobiles large bande améliorés, des communications à la fiabilité fortement accrue et au très faible niveau de latence, des communications de machine à machine de masse touchant un nombre élevé de terminaux de faibles coûts et batteries de longue durée.

Pour les médias, ces capacités augmentées seront utiles puisque les applications figurent parmi les plus consommatrices en ressources, nécessitant de très importantes capacités de réseaux pour des services audiovisuels haut débit et des délais de latence très faibles afin de permettre des expériences immersives, interactives et tactiles. Concernant ces dernières, une étude effectuée en 2018 pour Intel par le cabinet d’analyses Ovum montre que la 5G permettra l’accès à de nouvelles sensations, encore plus immersives : systèmes tactilo-kinesthésique : vêtements haptiques liés à des capacités de réalités virtuelles avancées.

Le consortium de recherche 5G Media a anticipé des évolutions dans trois directions pour les médias : applications « immersives » / réalité augmentée et virtuelle, « smart » production et production à distance, et transmission haute définition dynamique et flexible sur des réseaux de distributions de contenus. Deux scénarios sont envisagés pour chacune de ces déclinaisons. Concernant les applications « immersives », des joueurs pourront jouer ensemble à des jeux en 3D immersifs dans des espaces virtuels ou des spectateurs de l’eSport pourront suivre les jeux en 3D et sur plusieurs terminaux (mobile, réalité virtuelle).

Pour la « Smart production », la réduction des coûts, du temps de production et de la complexité grâce à la 5G (codage virtuel et moteurs de compression) entraînera une meilleure exploitation des contenus autoproduits (UGC) notamment et l’accès à des archives de ces contenus. Deux scénarios de « smart production » en découleront : l’un de production à distance en particulier d’événements en direct, et un autre de contribution (par exemple de journalistes) via le terminal mobile et facilité par les développements de la production assistée par l’intelligence artificielle.

Enfin, pour la transmission, les utilisateurs pourront accéder à leur écran à leur domicile ou en déplacement. De plus, ils pourront sélectionner et personnaliser leur sélection d’événements.

Plusieurs expériences de transmission de télévision haute définition (4K ou 8K) sur réseaux 5G ont déjà été réalisées : tournoi de golf en streaming pour Fox Sports aux États-Unis en 2018, célébration annuelle du printemps en Chine par le réseau chinois CCTV en collaboration avec l’équipementier Huawei et China Mobile en février dernier.

Les fake news véhiculées par les nouveaux médias peuvent concerner la santé. Manon Berriche, doctorante à Sciences Po – USPC a publié un article sur le site Internet de The Conversation dans le cadre du colloque « Santé et désordres de l’information : impacts et solutions », organisé le 20 juin dernier par la Conférence des Présidents d’Université. La désinformation touche aussi le domaine de la santé : fausses informations erronées sur les vaccins, remèdes miracles contre le cancer…

La page Facebook de Santé+ Magazine en est un exemple. L’équipe des Décodeurs du quotidien Le Monde l’a jugé comme un diffuseur majeur d’informations médicales erronées. Or selon l’Institut Reuters (un centre de recherche d’Oxford), elle génère à elle seule autant d’interactions sur Facebook que les pages des médias Le Monde, Le Figaro, Le Huffington Post, 20 Minutes et France TV info réunis. Étonnamment pourtant, l’audience du site Web de Santé+ Magazine reste bien inférieure à celle des sites de ces cinq médias.

En matière d’autorité, une récente étude montre qu’en France, la visibilité des informations au sein de l’espace médiatique dépend de l’autorité de la source. Les journalistes des médias traditionnels vérifient les informations avant de les relayer et fait attention à ne pas citer les publications douteuses. Depuis quelques années, des rubriques de vérification (« fact-checking ») sont apparues sur les sites web des grands médias. Néanmoins, le site de Santé+ Mag enregistre moins de bonnes audiences que ces sites. En revanche, sa page Facebook est très populaire. Les volumes d’« interactions » y sont impressionnants. Plus de 80 % des réactions sont provoquées par des publications qui ne sont pas issues d’une stratégie de désinformation. Sur la page Facebook de Santé + Mag, les contenus visuels entrainent 2 à 4 fois plus d’engagements que les vidéos et les articles. Ses fans sont beaucoup plus sensibles aux contenus imagés qui sont liés aux relations sociales qu’aux informations douteuses sur la santé.

Plusieurs expériences de psychologie ont révélé que les informations qui mettent en avant une idée de menace, de danger ou de dégoût et les relations sociales sont mieux mémorisées, attirent plus notre attention ou sont davantage transmises que les autres. Mais des recherches sur le sujet montrent que la correction factuelle n’est pas toujours efficace pour combattre la désinformation.

Enfin, il est essentiel de favoriser l’accès aux informations de qualité sur la santé pour augmenter la culture scientifique du public. Selon des travaux, le fait de montrer le consensus scientifique sur la question des vaccins améliore l’adhésion des gens.

De l’espace à la performance

Près de 50 ans après les premiers pas de l’Homme sur la Lune, l’espace intéresse toujours. Géraldine Poels, responsable de la valorisation scientifique des collections de l’INA et Véronique Lefort, documentaliste multimédia, analysent le traitement par la télévision des enjeux spatiaux entre 2009 et 2018 ainsi que la médiatisation de l’astronaute Thomas Pesquet pour le site Internet « La revue des Médias ». Elles ont étudié la manière dont la télévision a traité de ces enjeux ces dix dernières années (2009 – 2018). La mission de Thomas Pesquet à bord de la Station spatiale internationale (ISS), de novembre 2016 à juin 2017, apparaît comme le phénomène médiatique majeur.

Après le pic de 2009, année anniversaire, si la médiatisation de l’espace décroit, elle reste régulière. Sensibles à la géopolitique de la conquête spatiale, les JT traitent les nouveaux acteurs du secteur face aux puissances traditionnelles que sont les États-Unis, la Russie, et la France. Au cours de la décennie passée (2009 – 2018), 1 794 sujets ont abordé le thème de l’espace dans les JT du soir (TF1, France 2, France 3, Arte, M6 et Canal +), ce qui représente 0,6 % de l’offre totale d’information. Ce sujet est traité tous les 10 ans depuis les premiers pas sur la Lune, le 21 juillet 1969.

En outre, l’astronautique est un thème privilégié car il représente 65 % des sujets. Ainsi, 685 sujets ont été dédiés aux missions et projets d’exploration humaine. L’exploration robotique, l’observation spatiale, les sondes et les satellites de tous types totalisent 475 sujets. En revanche, l’astronomie, l’astrophysique et les sciences de l’univers représentent que 26 % des sujets (461) qui traitent les découvertes concernant les planètes, trous noirs, comètes, éclipses et autres chutes de météorites. Chaque été, la Nuit des étoiles est abordée dans les JT (14 sujets). Enfin, le restant des sujets a abordé des thématiques variées comme les décès d’astronautes ou le Salon international de l’aéronautique et de l’espace du Bourget. Les mots de l’espace dans les JT (descripteurs de l’INA, hiérarchisés selon le nombre d’occurrences). Mais avec 158 sujets, la mission de Thomas Pesquet à la Station spatiale internationale du 17 novembre 2016 au 2 juin 2017, est le sujet préféré de cette décennie médiatique. Toutefois, depuis 2012, les JT ont abordé à l’exploration de la planète Mars par le robot Curiosity (47 sujets), à la sortie dans l’espace de la flamme olympique ou à l’alunissage de la sonde spatiale chinoise Chang’e-3. De 2014 à 2016, ils ont aussi traité la sonde européenne Rosetta et le robot Philae sur la comète Tchouri (77 sujets).

Si les États-Unis, première puissance spatiale, arrivent en tête des pays cités dans les sujets dédiés à l’espace, la France se situe en 2e position avec 306 sujets, dont 71 pour le centre spatial de Kourou, 50 pour Le Bourget et 18 pour Toulouse. La télévision privilégie les lancements et le traitement de ces informations ne suivent pas les logiques économiques du secteur. Toutefois les médias accordent de l’attention aux nouveaux venus : la Chine, premier pays à se poser sur la Lune en septembre 2018, l’Inde, qui a lancé en 2017 la première fusée produite localement et la Corée du Nord, qui a placé des satellites en orbite en 2012 et 2016 et l’Iran. Le Centre européen des astronautes à Cologne où s’est entraîné Thomas Pesquet, permet à l’Allemagne d’être évoqué. Le Chili est cité pour le plus grand télescope du monde construit dans le désert d’Atacama. Enfin, la Suisse est abordée pour le CERN de Genève, particulièrement en 2012 avec la découverte du boson de Higgs. Les chaînes françaises ont accordé, en effet, des temps d’antenne à la mission de Thomas Pesquet, astronaute le plus médiatisé de la décennie. Les quatre experts les plus médiatisés représentent d’ailleurs l’expertise française dans le domaine spatial et scientifique : Francis Rocard, coordonne pour le CNES la mise en œuvre du programme d’exploration de Mars et supervise la mission Rosetta, en est un exemple. Enfin, les nouveaux acteurs du secteur des vols commerciaux et du tourisme spatial sont traités dans les médias : Richard Branson et Elon Musk.

Par ailleurs, les États-Unis occupent le haut du podium de la représentation médiatique en premier lieu grâce aux astronautes Edwin « Buzz » Aldrin, surtout en 2009 pour le 40e anniversaire du premier pas sur la Lune, et Scott Kelly, qui a passé 340 jours dans la Station spatiale Internationale. En revanche, côté russe, Mikhaïl Baryshev, psychothérapeute sur la mission expérimentale « Mars 500 », Dmitri Rogozine, homme politique et directeur de l’Agence spatiale russe, Oleg Novitski et Sergey Ryazansky, cosmonautes, n’ont occupé que deux passages.

À l’heure de l’égalité homme-femme, sur les 493 personnes interviewées dans l’ensemble des sujets portant sur l’espace, seulement 14 % sont des femmes. En 9e place, se trouve Claudie Haigneré, scientifique, spationaute et ancienne ministre.

En outre, la communication par Twitter a été privilégié par l’Agence spatiale européenne (ESA) durant la mission de Thomas Pesquet. Malgré tout, les chaînes d’information et les radios ont relayé cette visibilité sur le réseau social. Avec 220 tweets, lors des émissions spéciales, BFM TV a adopté cette stratégie surtout au moment de la retransmission en direct de l’atterrissage, le 2 juin 2017 (64 tweets en une journée). Ainsi, la chaîne a été mentionnée plus de 7 000 fois sur le sujet.

Néanmoins, des succès inégaux ont été remportés par les médias sur le réseau social : ainsi, Quotidien, l’émission de Yann Barthès, qui a reçu deux fois le spationaute en plateau, a obtenu plus de 4 500 mentions avec seulement 5 tweets, tandis qu’Envoyé spécial n’a été mentionné que 412 fois.

Une bonne qualité de vie au travail ne nuit pas à la performance. Dans leur article pour le site The Conversation, Emmanuel Abord de Chatillon, professeur à la Chaire Management et Santé au Travail, LEST CNRS, Aix Marseille Université, Grenoble IAE à l’Université Grenoble Alpes et Nathalie Bernard, doctorante CIFRE à l’Université Grenoble Alpes constatent que si les dirigeants des entreprises ne sont pas opposés au bien-être au travail, mais ils souhaiteraient avant tout que cette promotion de qualité de vie au travail ne se développe pas au détriment de la performance de l’entreprise.

Dans un travail de recherche, ces chercheurs ont identifié les pratiques de management les plus courantes dans les entreprises, contribuant à la fois au bien-être des salariés et la performance des entreprises, et le type d’entreprises ayant des pratiques associant les deux dimensions.

Il y a 30 ans sont apparues des pratiques de haute performance (High Performance Work Practices). Celles-ci disposent à la fois des éléments visant à faire évoluer le travail (cercles de qualité, groupes de résolution de problèmes…) et des aspects ayant pour buts de mieux impliquer les salariés (bonus collectifs, processus de résolution de conflits, etc.). Les chercheurs ont étudié leur impact sur le bien-être que la performance en examinant à la fois les pratiques de 271 entreprises et leurs situations en termes de bien-être et de performance. 5 composantes du bien-être au travail ont été alors identifiés : adéquation interpersonnelle, épanouissement, sentiment de compétences, reconnaissance perçue et volonté d’engagement. 4 composantes de la performance ont été notées : compétitivité, satisfaction des clients, engagement des salariés et performance sociale.

L’analyse des résultats ont montré que les pratiques dites de « Haute Performance » ont des effets variés sur les différentes dimensions de la performance et du bien-être. Ainsi, des pratiques ont un effet localisé et d’autres qui impactent aussi bien le bien-être que la performance. En outre, la satisfaction des clients, n’est pas touchée par les pratiques visant la performance. De plus, la sécurité de l’emploi, si elle est utile pour attirer des compétences, n’a pas de conséquences ni sur le bien-être des salariés, ni sur la performance.

D’autres pratiques ont aussi bien des répercussions sur le bien-être que sur la performance : des politiques de participation des salariés, des formations innovantes et des dispositifs visant à améliorer la gestion des carrières et l’évaluation.

En matière d’innovation sociale, l’initiative conjointe de BNP Paribas, Danone et Engie dont l’objectif est de soutenir l’intrapreneuriat à impact positif, indique que les grandes entreprises commencent à intégrer cette idée qui soutient les pratiques de participation aux décisions et de gestion de carrière.

Par ailleurs, les caisses allocations familiales promeuvent une qualité de vie au travail au service du bien-être au travail et de la performance. Le conseil départemental de la Savoie considère le bien-être et la santé au travail comme un axe stratégique au service des salariés et de la population locale.