REVUE DE WEB MAI

REVUE DE WEB MAI

Intelligence artificielle, communication de crise, crise sociale et technologique, lobbying et affaires publiques : voici les sujets de cette revue printanière.

De l’Intelligence artificielle à la crise

L’intelligence artificielle (IA)  est une technologie facilitant le travail du journaliste. Aurélie Jean, docteur en sciences et entrepreneur, déclare dans le site internet de Meta Media que l’IA est un allié du journaliste car elle influe grandement la presse en lui fournissant de l’information. Les rédacteurs peuvent ainsi produire du contenu éditorial de qualité. L’IA agit, en effet, à différents niveaux : la consommation personnalisée reposant sur une captation intelligente des usages du lecteur, la rédaction automatisée d’articles factuels et l’investigation soutenue par la collecte et l’analyse de données pertinentes.

Si l’IA assiste le journaliste, le journalisme numérique permet de mettre en avant les qualités humaines d’un bon journaliste : la curiosité, la surprise, le style éditorial, l’analyse fine des raisonnements humains, la confiance chez les autres et l’empathie. Par ailleurs, le futur du journalisme dépend de décisions culturelles.

Depuis de nombreuses années, les journaux et les magazines cernent les comportements de leurs lecteurs exigeants avec des sites web intelligemment architecturés pour leur proposer du contenu personnalisé. La popularité d’articles peut être mesurée par le nombre de clics, de « like », de partage ou le nombre et le contenu des commentaires. On peut également classer de manière explicite ou par des techniques d’apprentissage des profils de lecteurs afin de mieux identifier leurs goûts et leurs attentes. Enfin, avec les algorithmes de captologie, il est possible d’orienter plus précisément un lecteur vers un article qui peut l’intéresser, ou augmenter son temps passé à lire les contenus du journal.

Le contenu éditorial ne nécessite aucune sensibilité humaine élaborée dans la description des faits comme celle factuelle des actualités sportives, de la météo ou des tendances de la Bourse. Par exemple, chez Bloomberg, des scientifiques, des développeurs et des journalistes économiques construisent des modèles et des algorithmes capables de détecter les signaux révélateurs dans les flux officiels de données et de produire un article factuel d’un titre et d’une ou deux phrases décrivant l’évolution d’une grandeur. Cet article automatisé permet de capter plus rapidement et en premier l’intérêt du lecteur. Le nombre de lectures de l’article du journaliste économique augmente ainsi par une publication automatique anticipée du fait économique ou financier.

La croissance de la puissance de calcul et de la performance des algorithmes rend possible la collecte et le traitement plus rapide des données de plus grande taille. Les outils numériques et analytiques facilitent donc le travail du journaliste qui se penchera sur des interviews et des échanges privilégiés avec des individus mieux identifiés.

En outre, des journaux comme le New York Times et le Washington Post font appel à des algorithmes avancés afin de présélectionner des unes, conseiller efficacement des articles ou produire du contenu rédactionnel.

La communication peut permettre de gérer une crise. Dans son site Brandnewsblog, Hervé Monier donne la parole à Thierry Libaert, le spécialiste de la communication de crise. Pour cet expert, après les crises considérées comme un châtiment divin ou une fatalité, puis celle de l’accident technologique majeur, nous sommes entrés dans le nouvel âge des crises « mutantes et protéiformes », en modification permanente.

La communication de crise a ses héros et ses perdants. Ainsi, si Perrier est toujours considéré comme modèle pour sa communication en 1991 face aux traces de benzène dans ses bouteilles et Total comme l’erreur à éviter pour sa gestion du naufrage de l’Erika en 1999, Perrier a durablement perdu ses parts de marché, son indépendance et son Président, tandis que Total a continué à enregistrer des bénéfices et à augmenter sa valorisation boursière.

Concernant l’entrée en crise, deux écueils sont à éviter. Le premier :  considérer d’être en crise lors d’une phase passagère de critiques importantes, ou la peur qu’un bad buzz se transforme en crise. L’autre écueil : penser que son organisation a déjà connu beaucoup de crises par le passé et qu’elle a su toujours les résoudre. Or dans les périodes de réussite, les crises peuvent survenir car la vigilance est moins forte. Mais une crise peut entraîner des situations favorables et positives pour l’entreprise et des opportunités. En septembre 1982, aux Etats-Unis, Johnson & Johnson a produit un analgésique, le Tylenol, suspecté d’avoir causé plusieurs décès à cause de cyanure dans les bocaux. L’entreprise pratiqua alors une transparence totale sur sa chaîne de fabrication et rappela immédiatement ses produits. Après avoir été mise hors de cause, elle commercialisa son produit mais avec une triple protection. Surtout, elle poussa ses concurrents à augmenter la protection de leurs médicaments. Elle regagna aussitôt ses parts de marché et renforça sa réputation.

France Telecom et lobbying

France Telecom a connu des crises sociales et technologiques. Michel Albouy, professeur senior de finance à Grenoble École de Management (GEM) analyse, pour le site Internet de The Conversation, les mutations technologiques et les répercussions sociales de la société ex-France Telecom. De plus, il a été un jeune ingénieur à la Direction générale des télécommunications, devenue France Télécom et Orange par la suite.

Le cas France Télécom constitue, de son point de vue, est une entreprise exemplaire ayant subi des chocs technologiques, organisationnels et concurrentiels sans précédent. Outre la construction des autoroutes du téléphone, cette société a connu, une révolution technologique majeure avec l’arrivée de la téléphonie mobile.

Par ailleurs, Sous la présidence de Michel Bon, France Télécom a acquis, lors de la bulle Internet, l’opérateur de téléphonie mobile Orange en 2000 à un prix considéré alors excessif par les marchés. La capitalisation de l’entreprise a alors connu une chute de sa valeur.

Suite au dégroupage imposé en 2002 par la réglementation européenne, le réseau téléphonique détenu par l’opérateur historique a été mis à la disposition à l’ensemble des opérateurs de télécommunications. La concurrence s’est alors intensifiée avec des innovations technologiques et la baisse des tarifs. La dette de France Télécom s’est alors amplifiée à mesure que son chiffre d’affaires et ses marges chutaient.

Pour redresser l’entreprise, le plan « Next » (Nouvelle Expérience des Télécommunications), fut déclenché en 2004. Son objectif : supprimer 22 000 emplois sur la période 2006-2008 sans procéder à aucun licenciement. Ce plan a notamment entraîné un management brutal visant à réduire les effectifs avec des incitations au départ :  un grand changement pour un personnel attaché aux valeurs de la fonction publique. Ces modifications organisationnelles rapides et brutaux se sont révélés dévastateurs.

Aujourd’hui, ces dirigeants sont poursuivis en tant qu’auteurs d’une stratégie d’entreprise « visant à déstabiliser les salariés et agents, à créer un climat professionnel anxiogène » et ayant eu « pour objet et pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité ». L’entreprise France Télécom, en tant que personne morale, est également convoquée au tribunal. 39 personnes ont été retenues en qualité de victimes dans ce dossier. Parmi elles, 19 se sont suicidées entre 2007 et 2010.  Le top management de l’entreprise aurait donc une part de responsabilité importante dans ces tragiques évènements.

Si ces entreprises font appel à des agences de lobbying et affaires publiques, elles peuvent aussi connaître des dérapages. Dans le Blog du communicant 2.0, Olivier Cimelière soulève la question des fichiers, du lobbying et de la communication l’influence : Avec le concours de deux agences de communication et d’affaires publiques, Monsanto a constitué, en 2017, des fichiers contenant des renseignements sur plus de 200 personnes publiques qui portent un intérêt avéré sur l’herbicide Roundup à base de glyphosate, le produit phare de la multinationale américaine. Le déchaînement autour de cette affaire de Monsanto n’est surtout qu’un épisode d’une stratégie de communication et de lobbying dans laquelle l’ex-groupe américain n’a jamais aucune limite éthique et déontologique : rapports scientifiques caviardés, documents officiels falsifiés, experts corrompus, journalistes et détracteurs harcelés, sites Web opérant sous de faux-nez. Selon le communicant, un encadrement des cartographies doit s’améliorer. Si la loi interdit déjà toutes les indications à caractère religieux, ethnique, sexuelle et les jugements de valeur sans fondement constaté, Olivier Cimelière conseille d’utiliser des filtres rigoureux préconisés par l’Association Française des Conseils en Lobbying et Affaires publiques.