REVUE DE WEB MARS

REVUE DE WEB MARS

Les alertes des médias, la présence médiatique des femmes, la stratégie digitale des dirigeants et l’usage des réseaux sociaux en 2019 : voici les mots clés de cette revue de web printanière.

De la mobilité aux médias

Les médias conquièrent les écrans des smartphones. Sur le site Internet de l’Ina, la revue des Médias, Vincent Bresson, journaliste, remarque que depuis 2016, la consultation mobile des sites Internet dépasse celle sur ordinateur, et les mobinautes passent 40 % de temps de plus sur les sites d’information que les internautes traditionnels. Selon une étude effectuée en 2018 par le site d’analyse marketing eMarketer, 90% du temps passé sur mobile l’est sur des applications, dont près de la moitié consacré à une seule appli.

Pour attirer l’attention des utilisateurs des mobiles, la presse utilise donc depuis quelques années des alertes (ou push). Nathalie Pignard-Cheynel, professeure à l’académie du journalisme et des médias de l’université de Neuchâtel, a coréalisé en 2016 une étude sur le sujet, aux côtés d’Arnaud Mercier, directeur des études à l’Institut français de presse (IFP). Elle remarque : « Nous avons été frappés par le côté artisanal de la chose. C’était plutôt le stagiaire qui faisait les notifications, sans réel contrôle, sans hiérarchisation ni ligne éditoriale, à part BFM TV qui a une certaine culture de l’actualité en continu ».

À mesure que l’envoi de pushs s’est rationalisé et a évolué, il s’est accompagné d’une prise de conscience avec le succès de ces alertes. « Aujourd’hui, on le considère comme un format éditorial à part entière », note Thibaud Vuitton, rédacteur en chef du site France info. Pour accrocher le lecteur, les médias se sont progressivement adaptés à ce canal, multipliant les formats. La Columbia Journalism Review a ainsi identifié quatre grands formats de notification : le breaking news, le teaser, le résumé et le supplément de contexte. En revanche, les usages diffèrent au sein des rédactions françaises. France info offre des lives pour suivre, heure par heure, une actualité chaude. La rédaction de 20 Minutes a, quant à elle, préféré des « rendez-vous », programmés sur différentes périodes de la journée qui permet de créer du lien avec le lecteur.

La stratégie en matière de notifications porte également sur la rapidité d’envoi et provoque une course à la publication. L’envoi de pushs peut aussi dépendre du système d’exploitation mobile. Android active ainsi les notifications mobiles par défaut. En revanche, iOS demande l’autorisation à ses utilisateurs. Enfin, l’une des dernières mises à jour du système d’exploitation mobile d’Apple envoie les notifications d’une application par paquets.

Quelques années après l’introduction des alertes sur les apps de sites d’informations, 15 % des Français en reçoivent chaque semaine. D’après l’institut Reuters pour l’étude du journalisme, cette source d’accès aux médias en ligne a connu la plus forte croissance au cours de ces trois dernières années. Mais les alertes ne génèrent pas vraiment de trafic.

Selon Nathalie Pignard-Cheynel, avec les notifications, il est possible de maintenir le lien avec un lectorat mobile 5 fois plus fidèle via application que par des réseaux sociaux.

Si certains médias français se sont aussi lancés depuis plusieurs années dans la diffusion d’articles sur Whatsapp, les communautés d’utilisateurs sont limitées (entre 3 000 et 10 000 personnes). Mais il peut avoir un très bon taux d’ouverture sur ce support.

À la radio et à la télé, les femmes parlent 2 moins que les hommes. Pour la première fois, une intelligence artificielle a mesuré le temps de parole des femmes et des hommes dans les médias français. Réalisée sur 700 000 heures de programmes, soit le plus gros volume de données jamais analysé au monde, cette étude réalisée par David Doukhan, ingénieur de recherche à l’INA dresse un état des lieux, chaîne par chaîne, depuis 2001. Ce chercheur commente ces résultats pour le nouveau site Internet de l’Ina.

Quelle que soit la chaîne considérée, le taux d’expression des femmes est inférieur à 50 %, ce qui signifie que sur l’ensemble des chaînes TV, les hommes parlent davantage que les femmes. Les chaînes où le temps de parole des femmes est maximal, s’adresse à un public féminin : Téva et Chérie 25. En revanche, les chaînes sportives enregistrent les plus faibles taux d’expression des femmes : 7,4 % pour Eurosport et 16,5 % pour La chaîne L’Équipe. Le taux d’expression des femmes est plus faible pour les chaînes à programmation culturelle ou éducative (Histoire, Arte, France 5) que pour les chaînes à contenu généraliste. Parmi des chaînes généralistes, les plus forts taux d’expression des femmes sont enregistrés sur M6 (40,9 %) et sur TF1 (36,1 %).

À la radio, beaucoup plus de disparité sont notés dans le pourcentage de parole (par opposition au pourcentage de musique), avec d’une part, les stations à programmation majoritairement musicale (RFM, RTL2, Chérie FM…) qui diffusent plus de deux tiers de contenu musical, et d’autre part, des stations contenant principalement de la parole (France Inter, France Info, RMC). Pour les stations dont le contenu est principalement de la parole, le taux d’expression des femmes maximal est de 33,2 % sur Radio France International, et minimal sur RMC (16,9 %), une station diffusant beaucoup de contenu sportif.

Aux heures de forte audience, le taux d’expression des femmes baisse en moyenne de 3,2 %. Les plus fortes augmentations du temps de parole des femmes aux heures de forte audience sont observées pour les chaînes France 3 (+8,7 %) et Arte (+6,2). Sur le créneau prime time (19 h -20 h), le taux d’expression des femmes est de 37,7 % sur les chaînes publiques contre 24,6 % sur les chaînes privées. De plus, sur les stations de radio privées, les femmes ont un plus faible taux de parole aux heures de forte audience.

Le dirigeant et les réseaux sociaux

Selon Hervé Monier, auteur du Brandnewsblog, les dirigeants d’entreprises, d’institutions et d’associations hésitent de moins en moins à s’exprimer sur des thématiques qui ne sont pas nécessairement liées à leurs affaires et à la performance de leur entité.

La deuxième édition de l’étude « TOP 100 du leadership digital » de L’agence Angie+1 révèle que les dirigeants adoptent une stratégie digitale avec une réelle ligne éditoriale. Ainsi, Patrick Pouyanné (Total), Emmanuel Faber (Danone) et Isabelle Kocher (Engie) continuent à occuper les 3 premières places du classement établi sur la base de 7 critères par l’agence Angie+1. Dans cette édition 2019, un des plus puissants leviers du leadership digital est de porter haut et fort la « cause », la « raison d’être » ou le combat de leur entreprise… Emmanuel Faber (patron de Danone) et Pascal Demurger (DG de la Maif) paraissent exemplaires. Emmanuel Faber s’est fait une réputation avec son discours sur la justice sociale à HEC vu des millions de fois sur les réseaux sociaux. Pascal Demurger suit également cette dynamique : loi Pacte, entreprise à mission, lutte contre les inégalités, surconsommation, réchauffement climatique…

Quant aux femmes, elles sont peu nombreuses dans ce classement : elles sont 16 pour 84 hommes cette année avec 2 femmes seulement parmi les 20 premières places. Isabelle Kocher, DG d’Engie, qui occupe la troisième place dans le classement, s’exprime très régulièrement sur les réseaux sociaux. Elle y expose sa vision de la société et des enjeux clés comme la révolution énergétique. Elle fait d’ailleurs partie du Top 10 des influenceurs LinkedIn de l’année 2018 tout comme Clara Gaymard, qui sensibilise, avec Gonzague de Blignières, à l’économie bienveillante avec le MEB initié en 2018.

Les usages des réseaux sociaux continuent à évoluer en 2019. La journaliste du Blog du Modérateur, Cyrielle Maurice, révèle les résultats du baromètre annuel des médias sociaux réalisée par Harris Interactive. Il décrypte les usages des internautes français sur les réseaux sociaux ainsi que leurs rapports aux marques. Au cours de son étude, Harris Interactive a remarqué les nombreux usages, profils d’utilisateurs présents, la variété des plateformes offrant plusieurs services : commerce, messagerie, professionnel, microblogging… Harris Interactive présente une nouvelle classification de 5 profils d’utilisateurs. Les Young Addict Fans (YAF) sont une tranche jeune de la population très connectée aux réseaux sociaux représentant 20% des interrogés. Quant aux communic’Actives, elles sont des femmes actives dans les médias sociaux, avec relativement peu d’engagement vis-à-vis des marques (20%). Par ailleurs, les Brand Opportunists génèrent énormément d’engagement auprès des marques (28%). En outre, les Social Ghosts survolent les réseaux sociaux mais ils interagissent peu : 13%. Enfin, les Cold-Feet (20%) font appel très rarement aux réseaux sociaux.

Les applications de messagerie enregistrent la plus nette croissance. En 2019, 66% des internautes sont actifs sur ces applications, contre 60% en 2018. Concernant les réseaux sociaux en eux-mêmes, ils sont 77% à être actifs, contre 75% en 2018. 60% des internautes interrogés utilisent Facebook et 46% Messenger.

Malgré la défiance, les réseaux sociaux continuent à rester les plateformes privilégiées pour s’informer selon 64% des utilisateurs. Néanmoins, ces derniers accordent du crédit aux publications des médias traditionnels (57%) et s’estiment capables de distinguer une info d’une intox (66%) et de choisir des sources d’informations fiables (68%).